Alors que le conseil d’administration de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) a récemment voté en faveur d’une augmentation de la taxe sur l’immatriculation des véhicules pour faire face aux défis financiers des services de transport en commun, et ainsi éviter les réductions de service, certaines voix se sont élevées contre cette mesure.

Certains ont affirmé que ces 150 $ allaient étouffer la classe moyenne et se sont inquiétés des mères de famille monoparentales qui doivent aller reconduire leurs enfants à la garderie alors que le montant de la taxe sera le même pour tous, sans égard au niveau de revenu. D’autres ont dit que ce n’était pas une mesure raisonnable, d’autant plus qu’elle s’applique uniformément, peu importe la disponibilité réelle d’alternatives de transport.

Si c’est l’impact sur le budget des ménages de la classe moyenne ou celui des plus démunis qui vous pousse à vous opposer à cette hausse de la taxe sur l’immatriculation, permettez-moi de mettre les choses en perspective.

Au Québec, posséder une voiture coûte en moyenne plus de 1300 $ par mois. Le transport est d’ailleurs le deuxième poste de dépense des ménages, accaparant près de 20 % du budget. Le prix moyen d’une voiture neuve atteint maintenant 60 000 $ et il ne s’est jamais vendu autant d’automobiles !

La question se pose, est-ce vraiment l’augmentation de la taxe sur l’immatriculation, équivalente à 7,41 $ par mois, ou la dépendance à l’automobile, qui constitue la plus grande pression sur les dépenses des ménages ?

Si c’est la faiblesse des solutions de rechange à la voiture qui vous pousse à vous opposer à la hausse de la taxe sur l’immatriculation, quelle solution proposez-vous pour éponger le manque à gagner ? Hausser les taxes foncières, malgré la pression qui s’ajoute sur le prix des loyers, en pleine crise du logement ? Réduire les services encore plus ? Voilà une drôle de manière d’encourager les gens à délaisser leur voiture…

Les automobilistes et le transport collectif

Nous sommes à l’heure de développer massivement le transport en commun. Les automobilistes bénéficient directement du transport collectif parce qu’il réduit de manière importante la congestion routière, leur sauvant ainsi temps et argent. Et c’est parce qu’ils sont des bénéficiaires directs que les automobilistes doivent y contribuer.

Pourtant, leurs contributions n’ont pas été indexées depuis 2012 pour la taxe sur les carburants et 1992 pour la taxe sur l’immatriculation des véhicules, avant que la CMM ne l’adopte en 2024.

Ce qui signifie qu’en dollars constants, la contribution des automobilistes a reculé considérablement depuis une trentaine d’années. Faut-il également mentionner que le réseau routier municipal est entièrement gratuit à l’utilisation et que les automobilistes ne contribuent aucunement à son financement ?

 

De leur côté, les usagers et usagères du transport collectif voient leurs tarifs augmenter chaque année depuis des décennies pour suivre l’inflation, parfois même plus ! Le rattrapage et la mise à niveau de la contribution des automobilistes ne sont donc qu’équitables, d’autant plus que l’offre de service en transport routier s’est considérablement améliorée ces dernières années : prolongement de l’autoroute 35, complétion de l’autoroute 30, élargissement de l’autoroute 19, etc.

Si ce sont les questions de bien-être des populations vulnérables qui vous poussent à vous opposer à cette hausse de la taxe sur l’immatriculation, rappelons que la proportion de personnes dépendantes du transport collectif parce qu’elles n’ont pas accès à une voiture est très élevée chez les ménages plus démunis. Dans la CMM, c’est 44 % des ménages dont le revenu est de moins de 30 000 $ qui dépendent du transport en commun.

Pourtant, on ne vous entend pas craindre l’impact sur ces usagers lorsqu’on envisage de réduire les services. Pas plus qu’on ne vous entend craindre pour le budget de ces ménages face à des tarifs mensuels de 160 $ pour se déplacer en zone AB ! N’oublions pas que la région métropolitaine est le seul endroit au Québec desservi par une société de transport où on ne retrouve pas une forme de tarification sociale basée sur le revenu.

Si ce sont donc les questions d’équité qui vous poussent à vous opposer à cette hausse de la taxe sur l’immatriculation, ne devriez-vous pas plutôt tout faire pour réduire la dépendance à l’automobile, pour offrir des services de transport collectif si efficaces qu’il est possible de ne pas posséder de voiture, pour vous assurer que les titres de transport collectif soient abordables pour tous et toutes ?

Il me semble que poser la question, c’est y répondre.

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